Louis Roussy
Cette page comprend entre autre des extraits choisis du livre « Huguenots et protestants francophones au Québec : Fragments d’histoire », Marie-Claude Rocher – Marc Pelchat – Philippe Chareyre – Didier Poton, utilisés avec autorisation de l’auteur.
Louis Roussy : de la Suisse au Québec
Louis Roussy, d’ascendance huguenote, naquit en 1812 à Vevey en Suisse. Il fit ses études dans une école suisse, puis fut apprenti maçon. À 19 ans, il devint colporteur de livres religieux en France, et, deux ans plus tard, entra à Lausanne dans un séminaire pour missionnaires patronné par les Églises protestantes indépendantes de Suisse. C’est là qu’il fit la connaissance d’Henriette Feller, membre éminent d’un groupe protestant indépendant. En 1835, Henriette Feller décida de rejoindre des amis missionnaires à Montréal, Henri Olivier et sa femme ; Roussy lui offrit spontanément de l’accompagner. Il était presque impossible de convertir des habitants de Montréal qui étaient hostiles à tout prosélytisme, et Roussy partit immédiatement pour la campagne où on l’engagea pour enseigner à l’école de la paroisse de L’Acadie, située dans une colonie appelée Grande-Ligne.
Au bout de deux mois, Roussy dut abandonner son enseignement car on désapprouvait ses sermons du dimanche. Apparemment, il avait quelques ressources personnelles, en plus de l’aide qu’il recevait de l’Église suisse et peut-être de certains dons locaux. Grâce à son travail évangélique, Roussy convertit quelques personnes et Henriette Feller le rejoignit en 1836 pour enseigner dans une maison qu’elle avait louée. Dans cette partie de la province récemment ouverte à la colonisation, ils enseignèrent à la fois aux enfants et aux adultes, se servant de la Bible comme manuel. Vers le milieu de l’été de 1837, Roussy avait formé avec ses convertis la première Église protestante française du Canada. Quand la rébellion de 1837 éclata, les Patriotes assimilèrent les deux missionnaires aux protestants anglais et les harcelèrent jusqu’à ce qu’ils s’enfuient à Champlain, dans l’état de New York. C’est là que Roussy rencontra le docteur Cyrille-Hector-Octave Côté, l’un des meneurs de la rébellion, qu’il convertit et qui devint par la suite un membre efficace de la mission.
Deux mois plus tard, Roussy et Henriette Feller revinrent à Grande Ligne et furent chaleureusement accueillis par leurs fidèles et les habitants de la région. Leur œuvre fut mieux connue, et une aide financière arriva de Suisse, d’autres régions du Canada et des États Unis. Le premier bâtiment important de la mission fut inauguré en août 1840.
Soutenu, après 1845, par la Canadian Baptist Missionary Society, Louis Roussy demeura jusqu’à sa mort, survenue en 1880, le pasteur estimé de l’église de Grande Ligne. À l’occasion il enseigna au Feller College. Comme un colporteur, il parcourut le pays à cheval et distribua des livres religieux et des bibles. Il organisa des réunions et prêcha dans les maisons ou au coin des rues dans de nombreux villages au sud du Québec et dans le nord du Vermont, non sans essuyer souvent des rebuffades. Toutefois, il se consacra surtout à son église dont l’importance s’accrût et qui comptait, à sa mort, au moins 30 familles. Elle porte aujourd’hui le nom de l’Église Roussy-Mémorial.
Débat public : le colporteur c. l’apôtre de la tempérance
« C’est par le mensonge, le pillage, le meurtre et l’incendie que le Protestantisme s’est établi en Europe… C’est aussi par le mensonge que le Protestantisme veut s’établir dans nos campagnes, en attendant qu’il se serve de ses autres armes favorites : le meurtre et le pillage. »
Ainsi débute la brochure rédigée par Charles Chiniquy, alors prêtre catholique, pour faire rapport du débat public entre lui-même et Louis Roussy, pasteur méthodiste, qui eut lieu le 7 janvier 1851 au presbytère de Marieville devant plus de 400 personnes.
Dans la paroisse, une vingtaine de familles ont déjà quitté l’Église romaine. La communauté protestante est en voie de se constituer officiellement et elle a entamé la construction d’une église qui pourra accueillir 150 personnes. Une petite école fonctionne depuis quelques années. Ignace Bourget, évêque de Montréal, lance des avertissements virulents contre les missionnaires protestants, cette « poignée de maniaques, instruments sans conscience d’une main secrète qui veut allumer la torche qui a dévoré l’Irlande ». C’est donc le charismatique orateur Chiniquy qu’il dépêche pour affronter publiquement celui qu’on surnomme « le suisse », en référence au petit rongeur autant qu’à sa nationalité.
Né à Vevey en 1812, d’une famille de Réformés, Louis Roussy obtient une formation à l’Institut des missions de Lausanne, où il rencontre Henriette Feller. Arrivé au Canada en 1835, il travaille comme colporteur de Bibles et enseignant puis fonde, à la Grande-Ligne, l’Église dont il fut pasteur de 1845 jusqu’à sa mort, en 1880.
Pendant que M. Roussy s’échappe à travers la foule, un protestant qui craignait qu’on ne lui fit mal, et voulant le protéger, s’écrie : « M. Roussy est battu, c’est bien assez, il ne faut pas pour cela le tuer ! »
C’est pourtant un tout autre récit dont fait état l’article paru dans Le Semeur canadien, le 26 mai 1851. L’historiographie n’établit pas clairement de vainqueur et chaque communauté conserve la mémoire de sa propre version. Cependant, Chiniquy, s’étant converti au protestantisme en 1858, retourna à Marieville l’année suivante pour présenter ses excuses à la communauté. Cette visite est rapportée dans une note manuscrite du pasteur Laurent Rivard, ainsi que dans une lettre que l’abbé Laviolette, curé de Napierville, adresse à l’abbé Alexis Mailloux.